Les indicateurs de la performance en entreprise connaissent un essor considérable depuis quelques décennies. Dans une économie toujours plus compétitive et guidée par la maximisation du profit, les entreprises doivent prouver aux parties prenantes leur solidité financière et leur capacité à générer du rendement. A travers une multitude d'outils de contrôle, le manager sonde la santé de son entreprise, de ses équipes, il édifie ses stratégies, en mesure les écarts avant de les refondre. Il planifie, constate et surtout décide. Valeur actuelle nette, taux de rentabilité interne, excédent brut d'exploitation, résultat net, sont autant d'indicateurs utiles au manager pour prendre ses décisions. Car ces indicateurs servent avant tout à tracer le sentier de la réussite. Qu'ils soient imposés par des normes comptables (bilan, compte de résultat) ou bien le fruit d'une réflexion sur la théorie financière (valeur actuelle nette, taux interne de rentabilité), ces outils ont pour but de fournir une information juste et pertinente, exploitable dans le processus de décision. Véritable langage des affaires, ces normes structurent le dialogue entre les acteurs et sont devenues aussi omniprésentes qu'incontournables.
A ceux-là font écho toute une panoplie d'autres indicateurs, non financiers, qui vont être les garants des premiers. Autrement dit, des indicateurs secondaires propres à un service, à une équipe, voire même à un individu, vont refléter ses performances. Souvent construits à partir des outils informatiques disponibles dans l'entreprise, ils se veulent ergonomiques, faciles d'utilisation et automatisés au maximum. Un effort est donc fait afin de renvoyer des informations clés en minimisant le temps d'alimentation et de traitement des données. Taux de marge pour le service commercial, taux d'absentéisme pour les ressources humaines, délais de règlement pour les achats, productivité pour le responsable d'usine, sont autant d'indicateurs d'une performance partielle qui viendra alimenter les indicateurs globaux de la hiérarchie.
[...] Mieux travailler pour gagner plus, c'est ce que semble offrir un indicateur de performance à son utilisateur. Et pourtant, une contrainte est nécessaire afin que cet indicateur soit alimenté. s'il n'y a pas de reporting, ils n'ont pas de prime, puisque tout le système variable provient de ce reporting. L'acteur n'est donc pas rationnel. Et s'il a besoin d'une contrainte pour remplir cet indicateur alors qu'il semble tout en son intérêt de le faire, c'est qu'il poursuit d'autres objectifs que celui de gagner plus en variable. [...]
[...] Est ici remise en cause la stabilisation de l'organisation par les outils de gestion. Cela ne veut pas dire pour autant que la qualité technique de la neige n'intervient pas dans la qualité de la boule de neige. L'expérience, la qualité de l'environnement sont autant de facteurs qui conditionnent l'acte de conception, ce qui permet d'affirmer que l'appropriation évolue néanmoins dans un univers borné n'ouvrant pas à toute opportunité. Cette théorie fait écho à d'autres comme celles d'ORLIKOWSKI (2000), LIN et CONFORD (2001) et, plus largement, dans la vision des théories organisationnelle suggérées par CIBORRA (1999). [...]
[...] En effet, la création de sens par l'individu est étroitement liée aux contextes d'usage et à leurs évolutions. Selon PROULX (2001), la démarche individuelle d'appropriation [est] centrée sur l'acquisition individuelle de connaissances et de compétences : il s'agit de la manière dont un individu acquiert, maîtrise, transforme ou traduit les codes, les protocoles, les savoirs et les savoir-faire nécessaires pour transiger correctement avec [l'outil] L'outil devient donc un objet de connaissance pour l'usager. L'appropriation devient alors un processus de développement de connaissances qui repose sur trois mécanismes entremêlés : le learning by doing, le learning by using et le learning by interacting. [...]
[...] On imagine mal répondre à un questionnaire sur les jeux de pouvoir et d'influence que soulèvent les indicateurs de performance. L'entretien physique permet d'ouvrir une discussion et d'instaurer un climat de confiance en rappelant l'aspect anonyme et académique de la recherche. La valeur ajoutée de ces entretiens vient de leur conduite semi-directive, car c'est l'expérience, les témoignages des interlocuteurs qui sont les vecteurs de succès de l'étude terrain. En débutant l'entretien avec des questions très ouvertes, ils peuvent soulever eux-mêmes les problèmes que les indicateurs entraînent dans leur organisation. [...]
[...] Les outils de gestion ne sont pas des instruments résultant de l'univers économique ou social mais bien une manière de recréer continuellement cet univers. Se pose dès lors la question des processus qui nous permettent de construire nos actions, celles dont nous pouvons à la fois revendiquer le sens et la valeur. Après la recherche orientée sur la gestion de la conception ou de la diffusion, la gestion des processus devient de plus en plus active. Une réflexion sur la qualité et la gestion de l'appropriation des objets de gestion est donc à l'ordre du jour. [...]
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