Cas pratique, compétences du conseil d'administration, SA, société anonyme, lettre d'intention, conseil d'administration, engagements, obligation de résultat, obligation de moyen
Une SA va signer une lettre d'intention au profit d'une banque stipulant qu'elle s'engage à "faire en sorte que sa filiale soit toujours en mesure de respecter ses engagements envers la banque et de conserver sa participation dans le capital de cette filiale". Cet engagement relève-t-il de la compétence du conseil d'administration ?
[...] Pendant longtemps la jurisprudence a distingué principalement deux types de lettres d'intentions : - si la lettre d'intention implique une obligation de résultat, alors cela équivaut à une garantie et donc l'autorisation préalable du conseil est nécessaire. Ici la société mère promet un résultat précis et ne se contente pas de s'engager à faire tout son possible ; dès lors, la simple constatation de l'absence de survenance de résultat présumera la faute de la société mère et permettra donc d'engager sa responsabilité ; tel est le cas d'une lettre comportant l'intention ferme et définitive du signataire de faire le nécessaire pour que sa filiale puisse honorer ses engagements envers une banque (Cass. [...]
[...] Avant de déterminer si cet engagement relève ou non du conseil d'administration, il conviendrait de s'interroger sur la définition de la lettre d'intention. C'est l'article 2322 du Code civil qui vient la définir en disposant que La lettre d'intention est l'engagement de faire ou de ne pas faire ayant pour objet le soutien apporté à un débiteur dans l'exécution de son obligation envers son créancier Celle-ci est donc une sureté personnelle au sens de l'article 2287-1 du même code qui vient d'ailleurs préciser que Les sûretés personnelles régies par le présent titre sont le cautionnement, la garantie autonome et la lettre d'intention En l'espèce la SA , a priori, s'engage donc à faire en sorte que sa filiale soit toujours en mesure de respecter ses engagements envers la banque. [...]
[...] Mais, un arrêt de la chambre commerciale du 4 octobre 1994 pourrait par exemple remettre notre démonstration en question puisqu'il fut considéré qu'« Ayant constaté que, par sa lettre d'intention, une société s'engageait à faire tout son possible pour qu'une filiale poursuive son activité de façon qu'elle puisse notamment tenir ses engagements vis-à-vis de la banque, une cour d'appel retient à bon droit, hors toute dénaturation, que cette société n'était tenue que d'une obligation de moyens Ainsi, une ordonnance du 23 mars 2006 a consacré la lettre d'intention comme une technique de sureté personnelle sans distinguer selon qu'elle est porteuse d'une obligation de moyens ou de résultat (article 2322 du Code civil précédemment cité), la distinction jurisprudentielle doit être abandonnée : toutes les lettres d'intention accordées par une SA doivent désormais faire l'objet d'une autorisation préalable et ainsi l'engagement de la SA relève bien de la compétence du conseil d'administration. [...]
[...] Ce décret détermine également les conditions dans lesquelles le dépassement de cette autorisation peut être opposé aux tiers. Ainsi, il apparait que l'autorisation préalable du Conseil d'administration est nécessaire puisque la lettre d'intention de la société mère serait une garantie mais la distinction entre obligation de moyens et de résultat reste mince et les deux conceptions pourraient être concevables malgré une jurisprudence qui parait plus favorable à la qualification d'obligation de résultat et donc une autorisation préalable du conseil d'administration nécessaire. [...]
[...] Par ailleurs un arrêt de la chambre commerciale du 21 décembre 1987 est venu préciser que Malgré son caractère unilatéral, une lettre d'intention peut, selon ses termes, lorsqu'elle a été acceptée par son destinataire et eu égard à la commune intention des parties, constituer à la charge de celui qui l'a souscrite un engagement contractuel de faire ou de ne pas faire pouvant aller jusqu'à l'obligation d'assurer un résultat, voire encore constituer un cautionnement ; il appartient au juge de donner ou restituer son exacte qualification à un pareil acte sans s'arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée Dès lors que la lettre d'intention constitue un engagement juridique, la question du respect de la formalité de l'article L225-35 du Code de commerce, c'est-à-dire la nécessité d'une autorisation préalable du conseil d'administration, en cas de caution, aval ou garantie donnée par une SA est posée. En effet, le conseil d'administration dispose de pouvoirs généraux et de pouvoirs propres comme viennent préciser les articles L225-35 et L225-36 du Code de commerce. En matière d'autorisation, avant certaines décisions il est nécessaire de consulter le conseil d'administration qui précisera si oui ou non telle opération peut se faire. [...]
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