Pouvoir disciplinaire, chef d'entreprise, société, droit des affaires, employeur, entreprise
Dans le cadre de son activité salariée, M. Fournier conduit des véhicules automobiles. Dans sa vie personnelle, il a connu de nombreux déboires, qui sans les justifier, expliquent ses tourments et déviances. Récemment, après avoir causé un accident un dimanche au petit matin, son permis de conduire lui a été retiré pour conduite en état d'ivresse. Par ailleurs, il s'est fait adresser sur son lieu de travail, sous enveloppe sans marque particulière, des revues destinées à des couples échangistes, ouvertes par le service du courrier de l'entreprise.
L'employeur a été informé de ces deux faits en même temps, le 3 octobre 2013, M. Fournier justifiant de 20 ans d'ancienneté et n'ayant fait l'objet jusqu'alors d'aucune sanction. L'employeur hésite sur la conduite à tenir.
Finalement, il le convoque à un entretien le 20 janvier 2014, et lui notifie son licenciement 3 jours plus tard, après avoir dès novembre procédé à une retenue sur salaire.
[...] La cause de ce licenciement disciplinaire ou non est inconnue. Le salarié peut contester les deux mesures prises à son encontre : d'une part, sur la forme, il semble que la procédure disciplinaire n'ait pas été respectée par l'employeur et d'autre part, sur le fond, les fautes commises par le salarié ne semblent pas en elles-mêmes justifier un licenciement, quel qu'il soit (II). I. Une application critiquable de la procédure disciplinaire lors de la mise en place de sanctions disciplinaires Que ce soit dans l'utilisation de la retenue sur salaire comme dans celle du licenciement disciplinaire dans l'hypothèse qu'il soit disciplinaire l'employeur a agi de manière peu respectueuse de la procédure disciplinaire. [...]
[...] 1334-1 du Code du travail, pour le fait d'infliger une sanction pécuniaire à l'un de ses salariés. Toutefois, par exception, la retenue sur salaire peut être licite si elle n'est pas imposée à titre de sanction disciplinaire, mais simplement au titre de l'adage pas de travail, pas de salaire Cette solution a été encore réaffirmée dans un arrêt de la chambre sociale de la Cour de Cassation en date du 21 mars 2012. Ainsi, en cas d'absence ou d'inexécution de la tâche figurant dans le contrat de travail, une retenue sur salaire sera justifiée. [...]
[...] Enfin, le fait que la retenue sur salaire soit annulée, ce qui est probable, n'impacte en rien l'impossibilité de prononcer une nouvelle sanction : il a en effet été précisé dans un arrêt 27 juin 2001 que la nullité de la première sanction n'efface pas le fait qu'elle ait été prononcée, et empêche donc le prononcé d'une deuxième sanction, en l'espèce d'un licenciement disciplinaire. Dans les deux cas, les deux irrégularités de procédure précitées amènent au fait que le licenciement soit jugé sans cause réelle et sérieuse. C'est le cas à la fois du licenciement disciplinaire pour faute prescrite, et du licenciement disciplinaire déjà sanctionné, comme l'a rappelé la chambre sociale de la Cour de Cassation dans un arrêt en date 27 décembre 1984. Le non respect de la procédure dans le cadre du licenciement disciplinaire semble donc permettre à M. [...]
[...] De plus en plus encadré, le pouvoir de direction du chef d'entreprise est aussi, parmi tous ses pouvoirs, le plus suspect. Il procède en effet d'un réel pouvoir de punir qui nécessite de strictes limites. Le pouvoir disciplinaire du chef d'entreprise est, pour la Cour de Cassation, inhérent à la qualité de patron Aussi, son existence ne fait pas de doute en tant que composante essentielle du pouvoir de direction de l'employeur. Toutefois, il n'est pas sans poser de problème sociaux : en effet, un tel pouvoir, discrétionnaire, a pu aboutir à de nombreux abus, au premier rang desquels la possibilité, limitée par la jurisprudence dès 1932, de l'amende. [...]
[...] Or, en l'espèce, cette procédure ne semble pas avoir été respectée par l'employeur. D'une part, l'article L. 1332-4 du Code du travail prévoit une prescription du fait fautif du salarié : en effet, il dispose qu' aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement des poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l'exercice de poursuites pénales En l'espèce, aucune poursuite pénale n'a été entreprise par l'employeur dans ce même délai. [...]
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