L'examen, sous l'angle du droit international privé, de la jurisprudence récente en matière de concurrence déloyale montre que les tribunaux français sont surtout occupés de leur compétence juridictionnelle. La loi applicable suscite peu de contentieux : par-delà les circonvolutions, l'action en concurrence déloyale semble devoir être régie par la loi du marché affecté, qui constituerait d'ailleurs la solution de principe en passe de s'implanter à l'échelle européenne. En revanche, sur le plan des conflits de juridictions, on bataille ferme. Certes, lorsque le défendeur est domicilié dans l'Union européenne ou dans l'AELE, les juridictions de l'État de son domicile sont compétentes en vertu de l'article 2 de la Convention de Bruxelles, maintenant relayée par le Règlement (CE) 44/2001, dit « Bruxelles I », ou de la Convention de Lugano. Néanmoins, les trois textes précités offrent des compétences alternatives pouvant conduire à un tribunal qui, éventuellement, conviendra mieux au demandeur. C'est au titre de ces alternatives que deux cas de figure reviennent régulièrement au travers des décisions rendues entre 2003 et 2006. Le premier concerne un plaideur qui entend agir, sur le fondement de la concurrence déloyale, contre deux défendeurs, l'un établi en France, le second dans un autre pays européen : dans quelle mesure ces deux défendeurs peuvent-ils être assignés devant un même tribunal français ? Cette interrogation met en jeu la compétence en cas de pluralité de défendeurs (I). La seconde configuration oppose un demandeur à un seul défendeur, domicilié dans un autre pays de l'Union européenne ou de l'AELE. En vertu des instruments précités, un tribunal français pourrait être compétent si le « fait dommageable » s'est produit en France. Mais que faut-il entendre par là quand il s'agit de concurrence déloyale ? Cette fois, est en jeu la compétence des tribunaux français en matière délictuelle (II). Dans les deux cas, sont offertes des opportunités de plaider en France, qu'il importe de connaître, y compris avec leur part d'ombre et d'incertitude.
[...] Il est vrai que la doctrine n'a jamais été vraiment convaincue par la position de la Cour de justice, et la première chambre civile de la Cour de cassation, en particulier, est informée de ce manque de conviction. De fait, le passage où la Cour de justice impose une unité de fondement des demandes, remis dans le contexte de l'affaire sur laquelle elle avait à se prononcer, est surabondant et mal fondé. Surabondant, car, de toute façon, l'article 6.1 n'était pas applicable au litige, aucun défendeur n'ayant son domicile en France, pays du tribunal saisi, et celui à l'égard de qui la compétence française était constituée ayant son domicile en Australie ce qui, en plus, vis-à-vis de lui, rendait la Convention de Bruxelles inapplicable dans son ensemble. [...]
[...] supra ni la façon dont les faits sont disposés dans l'espace. Ensuite, il est certain que le défendeur assigné devant le tribunal de son domicile, en vertu de l'article 2 et d'une règle de compétence locale, devra répondre de l'intégralité du préjudice, quels que soient le lieu ou les lieux où celui-ci s'est concrétisé. Ainsi, la société Dargaud aura à répondre, si sa responsabilité est engagée, des préjudices subis en France mais aussi dans tous les pays où les bandes dessinées ont été diffusées en langue anglaise. [...]
[...] Le premier concerne un plaideur qui entend agir, sur le fondement de la concurrence déloyale, contre deux défendeurs, l'un établi en France, le second dans un autre pays européen : dans quelle mesure ces deux défendeurs peuvent-ils être assignés devant un même tribunal français ? Cette interrogation met en jeu la compétence en cas de pluralité de défendeurs La seconde configuration oppose un demandeur à un seul défendeur, domicilié dans un autre pays de l'Union européenne ou de l'AELE. En vertu des instruments précités, un tribunal français pourrait être compétent si le fait dommageable s'est produit en France. Mais que faut-il entendre par là quand il s'agit de concurrence déloyale ? [...]
[...] Le demandeur peut saisir aussi le tribunal de l'État membre dans le ressort duquel le préjudice est subi ; mais, alors, ce tribunal ne pourra connaître que de ce préjudice, à l'exclusion de ceux qui pourraient être subis à l'étranger. La localisation de l'événement causal Un arrêt de la cour d'appel de Colmar, en date du 5 avril 2005, se signale car il traite d'une difficulté assez rare : l'hésitation quant au lieu du fait générateur ou, en d'autres termes, quant au lieu de l'événement causal En l'espèce, une société du groupe français Aquarelle, fleuriste sur Internet, avait confié à une entreprise strasbourgeoise la mission de lui trouver un partenaire allemand. [...]
[...] Or, puisque les approches sont différentes, ce qui ne peut, par nature, s'agréger sur le fondement de l'article 5.3 pourrait trouver à se joindre procéduralement sur le fondement de l'article De plus, contrairement à ce que semble croire la Cour de justice dans l'arrêt Réunion européenne, on ne voit pas pourquoi il faudrait interdire à un maître d'ouvrage d'assigner ensemble, son maçon, sur un fondement contractuel, et le sous-traitant de ce dernier, querellé pour le même dommage sur un fondement délictuel. La Cour de justice, dans l'arrêt Réunion européenne, a donc procédé à une confusion des genres. [...]
Référence bibliographique
Source fiable, format APALecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture