Cas pratique, loi applicable, contrat de travail international, mobilité internationale, licenciement, Convention de Rome, Ratione Tempori, droit à rapatriement
Monsieur Vladimir exerce depuis plusieurs années une activité de cadre supérieur en France pour la Société Aviron. Il y a un an, son employeur lui propose de prendre la direction technique de sa filiale Aviron on line, sous le contrôle de la société mère, aux États-Unis pour deux ans.
Il signe alors un nouveau contrat de travail, mais cette fois avec la filiale Aviron on line. Ce deuxième contrat prévoit une augmentation de sa rémunération et de nouvelles responsabilités. Les conditions de travail restant inchangées pour le reste.
La société mère s'engage oralement auprès de lui et de son épouse à faire créer un poste de commercial pour cette dernière par la filiale dans la même région. Après avoir suivi une formation en France, Madame Vladimir signe donc un contrat de travail avec la société américaine Aviron on line au siège de la société mère.
Son contrat stipule qu'en raison de sa condition de femme, elle bénéficie d'une rémunération moindre à celle des employés de sexe masculin travaillant dans les mêmes conditions. Il y est aussi prévu que le droit applicable serait celui qu'applique le siège de la société mère du groupe, soit la loi française.
La filiale par la suite fut contrainte de licencier Monsieur Vladimir pour des motifs économiques. Le couple rentre alors en France sans aucune aide de la part des sociétés. L'époux fait comparaître la filiale américaine devant le conseil des prud'hommes de son domicile. Il entend ainsi faire valoir un droit à rapatriement. Son épouse, elle, demande un rappel de salaire fondé sur le principe d'égalité de traitement entre les hommes et les femmes.
[...] On se demande alors si un même contrat de travail peut prévoir l'application de différentes lois ? L'article 3 paragraphe 1 de la Convention de Rome prévoit expressément qu'un employeur et un salarié puissent désigner la loi applicable à la totalité ou à une partie seulement de leur contrat sous réserve de la cohérence de celui-ci, on appelle cette technique le dépeçage du contrat Il est donc possible que le contrat de Mme Vladimir prévoit à la fois l'application de la loi française pour certaines dispositions et à la fois celle d'un État des États-Unis pour d'autres. [...]
[...] Il ne fait aucun doute que c'est la loi française interdisant les discriminations en matière de rémunération qui est la plus favorable pour le salarié. Cette loi relève de l'ordre public général[7] qui interdit les pratiques discriminatoires et est reprise par plusieurs lois et jurisprudence, tels notamment l'article 1142-1 du Code du travail nul ne peut prendre en considération du sexe des mesures, en matière de rémunération L1132-1 ou encore l'arrêt rendu par la Cour de cassation en sa formation de chambre sociale du 29 octobre 1996 (affaire Ponsolle). [...]
[...] Pour nous aider dans cette tâche, différents textes sont susceptibles d'être appliqués, tel la Convention de Rome du 19 juin 1980 ou encore le règlement communautaire 593/2008 du Parlement européen et du Conseil du 17 juin 2008. Ces deux textes présentent un contenu identique en matière de règles prévoyants l'application de la loi applicable au contrat de travail international. Il faut noter que ces textes ont vocation à s'appliquer même si la loi en cause n'est pas celle d'un État contractant, car ils ont une portée universelle. Ce qui est le cas en l'espèce car les États-Unis ne sont contractantes ni à la Convention, ni au règlement. [...]
[...] Le juge pourrait de cette façon également relever que la législation applicable au contrat international est la législation française. Nous avons noté que l'article 6-1 de la Convention énonçait que le choix de cette loi (loi d'autonomie choisie par les parties) ne peut priver le salarié de la protection minimale que lui assure les dispositions impératives de la loi qui serait applicable à défaut de choix Mais absolument rien ne pourrait entraver le choix de la loi d'autonomie, car l'éventuelle loi pouvant s'appliquer à défaut de choix est également la loi française, comme nous l'avons vu dans la première hypothèse. [...]
[...] Finalement, concernant le champs d'application temporelle, le second contrat fut conclu entre le travailleur et la filiale il y a approximativement un an (les faits ne précisent pas exactement cette date), il ne semble alors pas que le règlement de 2008 soit retenu, car il s'applique seulement aux contrats conclus après le 17 décembre 2009, qui est la date d'application du Règlement[3]. Néanmoins, la Convention de Rome est applicable car le contrat fut passé après le date de l'entrée en vigueur de la Convention en France. La Convention de Rome est donc applicable au contrat de travail de Mr Vladimir. [...]
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