Le capital investissement ne cesse de faire « les gros titres » de la presse financière : certains le diabolisent, d'autres l'idolâtrent.
Comment se faire une idée objective à travers des articles de presse qui sont loin d'être unanime sur l'avenir du « private equity ».
Ce sujet assez épineux et fascinant a éveillé toute ma curiosité et se matérialise par ce présent mémoire.
Alors que mon étude débutait dans une perspective d'éloge du capital investissement, l'actualité m'a rapidement fait prendre conscience de l'intérêt de nuancer le succès actuel du « private equity ».
Le marché du capital investissement (ou private equity dans la terminologie anglo-saxonne) comprend l'ensemble des participations détenues par des investisseurs individuels et institutionnels dans des entreprises non cotées. Présent de longue date aux Etats-Unis, ce marché a connu récemment un développement soutenu sur le sol européen.
Le capital investissement regroupe des types d'investissement de natures assez différentes. Cohabitent ainsi des opérations de financement d'entreprises nouvelles ou en expansion, qui ont besoin de capitaux pour financer leur développement (capital risque et capital développement, ou venture capital), et des opérations de rachat d'entreprises déjà établies, préalablement cotées ou – plus généralement – non cotées sur un marché d'actions (capital transmission ou buyouts).
Les montants levés par les intermédiaires spécialisés ont atteint, en 2006 en Europe, des niveaux jamais égalés pour ce type d'investissement, et les statistiques préliminaires pour l'année 2006 témoignent d'une accentuation de cette tendance.
En 2006, les fonds levés par les investisseurs en capital européens se sont ainsi montés à 90 milliards d'euros, contre 48 milliards en 2000 et seulement 8 milliards en 1996.
Le capital investissement doit son succès à des facteurs tant conjoncturels, comme l'abondance de liquidités et la faiblesse des taux d'intérêt, que structurels (recentrage des groupes sur leur cœur de métier, départs à la retraite de nombreux chefs d'entreprise, etc).
Depuis dix ans, les opérations de capital transmission se renforcent et deviennent, en valeur, très largement prépondérantes.
On note une accélération, depuis 2006, de l'engouement pour ces fonds LBO (leverage buy out ou rachat d'entreprise par endettement avec effet de levier), au point même de commencer à inquiéter. Avec 664,7 milliards de dollars, ils pèsent 18,4 % du volume total des fusions-acquisitions dans le monde. Leur poids a quasiment doublé en un an.
Dernièrement, des records ont été enregistrés en matière de LBO, segment qui absorbe la majeure partie des financements et, aussi, le plus médiatique. Les titans du secteur comme Blackstone Group et KKR ont, tour à tour, signé les plus grosses opérations de LBO : respectivement de 39 et de 45 milliards de dollars. La ferveur est telle-que plusieurs fonds de LBO, tel que Blackstone, n'hésitent plus aujourd'hui à s'introduire en bourse pour notamment lever plus facilement des fonds et rendre plus liquide leurs actifs.
En théorie, le rendement du capital investissement doit offrir une prime compensatrice du risque et de la faible liquidité de ce type d'actifs. On aurait donc tendance à croire dans un premier temps, que le capital investissement offre de meilleurs rendements que le marché.
Les études empiriques disponibles, émanant en particulier du monde académique, aboutissent cependant à des résultats contrastés quant à la performance du capital investissement par rapport à celle des actifs concurrents, en l'occurrence les actions cotées. Les performances des fonds de capital investissement présentent par ailleurs au niveau individuel une forte hétérogénéité, en fonction de la qualité des gestionnaires : des fonds aux performances très élevées cohabitent avec des fonds très peu performants. Il est donc crucial, pour l'investisseur, de sélectionner avec rigueur les structures et les gérants auprès desquels il effectuera ses placements.
Alors que le capital investissement s'adresse principalement aux entreprises de taille petite ou moyenne non cotées, notons que le développement très rapide des opérations de LBO de grande taille est potentiellement source de risque pour le régulateur de marché.
Tous ces éléments soulèvent de véritables interrogations quant à la pérennité du capital investissement. Assistons-nous à l'âge d'or ou au déclin de ce dernier ?
Le resserrement des taux d'intérêt qui a notamment provoqué la crise des subprimes n'est pas sans conséquences sur le private equity et plus particulièrement sur les fonds LBO.
L'objet du présent mémoire sera, dans une première partie, d'exposer l'évolution du capital investissement (notamment celui des fonds LBO) depuis ces dernières décennies et d'expliquer pourquoi ce mode de financement rencontre un vif succès ces dernières années.
La frénésie est telle-que nous assistons, depuis quelques mois, à l'introduction en bourse de certains fonds de private equity. L'analyse de ce phénomène, à priori paradoxal, fera l'objet de notre deuxième partie.
Enfin dans une troisième partie, nous expliquerons pourquoi la crise des subprimes impacte négativement le capital investissement depuis fin juillet 2007. Nous appuierons cette analyse avec une étude empirique (Blackstone) nuançant le succès de son introduction en bourse avec ses performances négatives (-25%) notamment dues à une crise de liquidité. Enfin, nous tenterons d'esquisser la tendance future du capital investissement laissant présager que celui-ci n'est pas encore « évincé ».
[...] Il s'agit de l'un des plus vieux fonds américains, KKR PEI (filiale du groupe KKR), qui a ouvert la brèche en mai 2006. La firme new-yorkaise a récolté 4.8 milliards de dollars à la bourse d'Amsterdam, soit plus de trois fois le montant initialement visé. Depuis cette date, d'autres fonds très médiatisés avec par exemple Apollo et plus récemment la société de gestion Blackstone ont suivi cette tendance. Le phénomène semble, à première vue, assez paradoxal lorsque l'on écoute les mentors, du private equity et des LBO sur des entreprises non cotées, clamer les mérites de l'investissement privé face à la vision court- termiste de la bourse, et l'attrait de la confidentialité loin des feux de la rampe boursière La cotation en bourse d'une société d'investissement dans le non-coté n'est cependant pas une nouveauté. [...]
[...] (Cf étude de Lehman Brother en annexe Après avoir démontré que Blackstone sous performe comparé aux indices CAC 40 et LPX, focalisons à présent notre comparaison sur ces deux indices. Comparaison des performances : indice CAC 40 et LPX50 sur deux années glissantes : 2005-2007 Source : Bloomberg Tout d'abord, le présent graphique confirme l'existence d'une corrélation indiscutable entre ces deux indices. L'indice PE, sur deux années, sous- performe légèrement l'indice CAC. Depuis août 2007, les performances affichées du PE demeurent nettement moins attractives que celles du CAC. [...]
[...] Le schéma suivant expose la nouvelle répartition du capital post-IPO : Ayant choisi la forme d'un limited partnership Blackstone a pu s'autoriser quelques écarts par rapport aux canons classiques d'une IPO notamment en matière de gouvernance et de transparence. Ses actionnaires minoritaires n'auront pas en main des actions, mais des parts common units à droit de vote très limité. En cas de fusion avec une autre firme, ils n'auront aucun droit de véto. Et même si l'un deux dépassait les des parts, il perdrait tout droit de vote. [...]
[...] Du fait de l'activité même des fonds de PE, la question de la levée des fonds à investir est centrale. L'appel à la bourse constitue alors une alternative (ou un complément) non négligeable par rapport aux investisseurs classiques du PE : banques, gestionnaires de fonds, fonds de pension Pouvoir lever des fonds supplémentaires auprès d'investisseurs différents constitue incontestablement un avantage important, mais prend tout son sens dans le cadre des véhicules de coinvestissement. Monique Cohen explique, notamment, la genèse d'Altamir, en 1995, par la difficulté conjoncturelle à lever un fonds auprès d'investisseurs institutionnels. [...]
[...] Dans les opérations de LBO, le levier mis en place est généralement le point d'équilibre entre les intérêts du banquier et celui des investisseurs. Le niveau de levier est généralement défini par la capacité de la société à générer du Cash et la capacité de remboursement de la cible. Les évolutions récentes ont montré un accroissement significatif des effets de levier. En raison d'une concurrence forte sur le segment des LBO, de conditions macroéconomiques favorables, de liquidités abondantes, les structures de financement peuvent être de plus en plus agressives. Les leviers moyens s'élèvent à 5,7x EBITDA pour les grandes opérations. [...]
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