Comptabilité, finances publiques, notion, Etat, marché, droit budgétaire
Pour présenter un cours de droit budgétaire, ou au plus large du droit des finances publiques, il convient de s'interroger sur le rapport entretenu par l'Etat, une institution formelle (soit la mise en cohérence d'une réalité politique diffuse par le principe d'une autorité unitaire formalisé), et de la pratique marchande (soit la mise en cohérence d'une réalité de l'économie politique par le principe d'un échange multiple formalisé), une institution relationnelle. Il s'agit de l'opposition et des relations entre une forme juridique et un format économique, entre ce qui est l'institution formelle de la violence, et ce qui est l'institution langagière de la société marchande, de la société solidaire, de la société de la richesse de l'échange et de l'échange de la richesse.
Si la première histoire, celle de l'Etat est constante dans son entretien, dans son étatisation, dans sa figuration, dans sa matérialisation économique et juridique, dans sa militarisation, dans sa réduction financière comme dans son optimisation économique, la seconde histoire, elle, est plus dense, plus complexe, plus oubliée aussi, parce qu'elle constitue le reflet d'une société optimisée mais rendue à sa plus simple raison d'existence : un échange. L'histoire de la société est ainsi faite de la reconnaissance et de la connivence avec l'Etat, que la société a pu s'instituer comme une réalité, alors qu'il s'agissait d'une institution, d'une illusion juridique qui unissez sa multiplicité langagière, en une institution sociale et publique, dans une institutionnalisation de l'ordre public.
De cette imbrication d'une histoire de l'Etat et de la société, dont on sait depuis Hegel qu'il s'agit de l'histoire contemporaine de la politique, l'un des liens majeurs qui l'institue est un droit public organique : le droit budgétaire, le droit, littéralement, du budget de l'Etat. Ce droit public organique en a toute les caractéristiques : il organise l'Etat, au sens où il l'institue et le matérialise, au sens où le droit budgétaire organise et fonctionnalise la puissance publique unitaire. Ce droit public organise l'Etat comme un droit de puissance, comme un droit relevant de la souveraineté étatique et ne participant pas du commun, soit du rapport contemporain de la politique, mais d'un rapport ancien du pouvoir institué, temps où le dialogue de l'Etat se faisait puis s'instituer en lui, sous le sceau du secret (...)
[...] Walter Benjamin affirme que L'histoire est l'objet d'une construction dont le lieu n'est pas le temps homogène et vide, mais le temps saturé d'a-présent Ainsi pour Robespierre, la Rome antique était un passé chargé d'a-présent qu'il arrachait au continuum de l'histoire W. Benjamin, Sur le concept d'Histoire in Œuvres III, Folio, essais, XIV, p J. Carbonnier, Le Code Civil in Les lieux de mémoire, (dir. P. Nora) t. II, La nation, p Pour retrouver le territoire d'investigation si juste, si pertinent de Guy Debord, il faut affirmer que La séparation est l'alpha et l'oméga du spectacle. [...]
[...] La Révolution invente alors la valeur économique décrétée par la puissance souveraine. Au point comme le relève Stourm que les budgets disparaissent à la création du papier monnaie, on se contente de faire un ajustement par la création d'assignats Cet usage défiant la raison, dont on sait que la révolution française ne fut pas avare, imposera les finances publiques modernes sous la perspective d'une économique publique particulièrement déqualifiée, tant par l'histoire coûteuse de la guerre, comme de la gestion inconséquente de l'État, au moins jusqu'au Consulat. [...]
[...] Ce que montre, assez mal, l'organisation juridique du droit budgétaire, qui comme tout droit organique impose un ordre qu'il croit faire croire comme ordre et comme logique, ce n'est pas la privatisation de l'État, mais au contraire la formidable publicisation du capital, l'incroyable poids économique des États ne consistant pas en des actes de régulations (la monnaie, les taux d'intérêts, les dettes publiques), mais aussi en une possession publique du marché (restons dans le raisonnement logique, comment les finances publiques pourraient avoir un rôle économique aussi central s'il ne s'agissait pas d'une activité économique centrale ? est-ce que l'endettement public et les investissements publics ne sont pas la condition centrale de réalisation de l'investissement privé ? [...]
[...] Hegel, Principes de la philosophie du droit, P.U.F., Quadrige (trad. J.-F. Kervégan) L'histoire de la souveraineté est consubstantielle d'une histoire de la propriété. Essentiellement parce que le pouvoir politique des barbares s'est élaboré comme un processus de conquête de l'appareil d'État, comme un champ de richesses et de puissance militaire approprié. Pour faire dans le vertige des grandes axiologies historiques, on peut étirer une histoire post-romaine et post-moderne de la souveraineté, au sens où nous aurions perdu la trace originaire de la souveraineté romaine, pour la consacrer, la retrouver, à la Renaissance, formulée comme une théorie (je pense à celle de Jean Bodin, notamment, et bien entendu, à celle de Thomas Hobbes dans le Léviathan). [...]
[...] C'est là le sens formel de la construction de l'économie politique contemporaine. De ces rapports complexes, le plu ténu, consiste dans l'échange structurel, linguistique, dans l'acte de contamination, entre la puissance autonome des relations entretenues sur le marché, et la puissance unitaire d'un État en quête constante de légitimité, construit et déconstruit de ces fondements juridiques et politiques conventionnels, d'un marché civil et politique, et reconstruit comme illusion légitimante d'un unité improbable, par le principe de souveraineté. La puissance de structure multiple du marché capitaliste est ainsi confrontée à ce dédoublement politique de l'État. [...]
Référence bibliographique
Source fiable, format APALecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture