Parodie droit d'auteur, droit des marques, exception légale, oeuvre parodiante, parodie, fonction commerciale, reconnaissance prétorienne, encadrement, législation, règlement, liberté d'expression, droit moral
M. Le Chapelier voyait dans l'ouvrage « la plus sacrée, la plus légitime, la plus inattaquable, et […] la plus personnelle de toutes les propriétés », légitimant ainsi le droit de propriété de l'auteur sur son œuvre. A ce titre, l'article L111-1 du Code de propriété intellectuelle dispose que « L'auteur d'une œuvre de l'esprit jouit sur cette œuvre, du seul fait de sa création, d'un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous ». Le droit d'auteur est dès lors reconnu comme conférant un droit de propriété à son titulaire depuis la loi du 11 mars 1957. Cependant, la nature du droit d'auteur a fait l'objet d'une longue évolution dans le temps et reste encore débattue aujourd'hui. M. Vivant souligne qu' « à sa naissance, le droit d'auteur n'était pas simplement [le] droit naturel que l'ont dit » : il entend par là qu'il s'agissait essentiellement d'un droit économique, proche du copyright américain, puisqu'il tendait à garantir à l'auteur une rémunération équitable. L'idée de propriété en matière de droit d'auteur a été fortement contestée, notamment par Pierre-Joseph Proudhon pour qui « si la propriété, c'est le vol [...], la propriété littéraire et artistique, c'est le comble de l'absurde ». La notion de propriété associée au droit d'auteur a émergé réellement au XIXe siècle avec le Traité d'Eugène Pouillet qui se fondait essentiellement sur un arrêt de la Cour d'appel de Paris de 1853 et sur l'arrêt « Masson » de la Chambre des requêtes de 1880 prévoyant qu' « une composition littéraire matérialisée par la publication constitue un bien susceptible de propriété ». Ce n'est finalement qu'au XXe siècle que la majorité de la doctrine reconnaît le droit d'auteur comme un droit de propriété, mais le scinde en deux branches. Il s'agit de la théorie dualiste, que l'on retrouve aujourd'hui dans le Code de propriété intellectuelle. Cette propriété se décompose alors en deux séries de prérogatives, à savoir les droits moraux et les droits patrimoniaux. Ainsi, le législateur est venu protéger la création artistique en octroyant un droit de propriété à l'auteur sur ses créations, au même titre que le droit de propriété en droit civil sur les biens corporels prévus à l'article 544 du Code civil. Celle-ci s'acquiert du seul fait de la création de l'œuvre, contrairement aux autres droits de propriété intellectuelle qui nécessitent un enregistrement, comme en matière de marque. Par la suite, le Conseil constitutionnel est venu inclure les droits de propriété intellectuelle, notamment le droit d'auteur, dans la notion de « propriété » consacrée par l'article 2 de la Déclaration de 1789 comme un droit naturel. La Cour européenne des droits de l'homme a également considéré que le terme de « biens » employé par l'article 1er du protocole n°1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme (CEDH) incluait les choses incorporelles, dont le droit d'auteur.
[...] Ce genre de parodie semble a priori n'être pas conciliable avec le droit au respect de l'œuvre de l'auteur, mais a cependant été admis dans certaines décisions. À titre d'exemple, le Tribunal de grande instance de Paris a statué sur un dessin publié dans Playboy qui reproduisait le tableau Le Viol de René Magritte et a accueilli l'exception de parodie[170]. Elle constate ainsi un effet outrancier et comique obtenu par le mélange de sexes de l'illustration de Playboy Dans un tout autre sens, la Cour d'appel de Paris a exclu l'exception de parodie pour un film pornographique parodiant l'œuvre d'Edgar Rice Burroughs Tarzan Elle a relevé que le caractère grossièrement pornographique de l'œuvre contrefaisante [était] à l'évidence exclusive. [...]
[...] [118] Cass. civ. 2ème octobre 2006. [119] TGI Paris juillet 2001. [120] TGI Paris, ord. réf juillet 2002. [121] TGI Paris, ord. réf août 2002. [122] CA Paris, 14ème ch. [...]
[...] À ce titre, Pierre Vivant analyse l'article L. 122- 5.4 non pas comme une exception au droit d'auteur, mais comme une limite à celui-ci, c'est-à-dire qu'il serait décidé que la parodie ne constituerait pas une atteinte au droit moral. Cependant, il ne s'agit pas de dénier toute possibilité à l'auteur d'agir sur le fondement de l'atteinte au respect de l'œuvre, mais seulement d'établir un équilibre entre parodie et droit d'auteur. Dès lors, il convent de confier au juge le soin d'apprécier si la parodie, au regard des lois du genre c'est-à-dire des usages, constitue une atteinte au droit moral de l'auteur. [...]
[...] Dès lors, les exceptions au droit d'auteur connaissent une période de turbulence. Lorsque les conditions de l'exception sont remplies, elles permettent de faire échec au monopole exclusif de l'auteur sur son œuvre et d'autoriser le tiers à utiliser ladite œuvre sans contrepartie financière (sauf exception). Néanmoins, l'exception ne va jouer que pour les droits patrimoniaux de l'auteur et ne concerne dès lors pas le droit moral : le tiers se doit de respecter ce droit moral dans le cadre de l'utilisation de l'œuvre qu'il va faire. [...]
[...] On peut alors se demander si l'existence d'une exception de parodie en droit d'auteur n'a pas conduit, par analogisme, à faire émerger une exception de parodie en droit des marques. Cette question est d'autant plus légitime qu'il n'est pas rare que le titulaire d'une marque soit également détenteur de droits d'auteur sur le signe, bénéficiant ainsi d'une double protection juridique. Ainsi en cas de parodie, il pourra invoquer le droit de propriété intellectuelle qui lui permettra d'obtenir gain de cause. [...]
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