Parfumerie, Chanel, Coco Mademoiselle, Charles Baudelaire, Le serpent qui danse, imaginaire parisien, féminité, esthétique, campagne publicitaire, Keira Knightley, identité féminine, performance artistique
La campagne publicitaire lancée par Chanel pour le parfum Coco Mademoiselle s'appuie sur un imaginaire fort et des formes classiques. Cependant, la force de son évocation tient également aux choix esthétiques modernes qu'elle opère, concernant l'image de la femme notamment. De ce point de vue, cette campagne publicitaire relève l'habile pari d'offrir de nouvelles perspectives tant à l'univers de la parfumerie qu'à l'identité féminine qu'elle convoque.
Ainsi, nous nous demanderons dans ce travail dans quelle mesure les supports de la campagne publicitaire permettent de renouveler les codes traditionnels de la publicité de parfums. Dans cette perspective, nous verrons dans un premier temps que les supports employés donnent à voir une image renouvelée de la féminité, avant de voir dans un second temps que l'univers mobilisé s'appuie très largement sur un imaginaire parisien idéalisé.
[...] Sur l'une des affiches de la campagne, le modèle tient un chapeau melon pour dissimuler sa poitrine. L'emploi de cet accessoire sert doublement le message délivré : d'une part, il s'agit de mettre en scène la pudeur de la femme, surprise alors qu'elle n'est pas préparée. D'autre part, le chapeau melon représenté un attribut masculin : en cela, la femme représentée ici donne l'image d'une féminité conquérante, qui reprend à son compte l'univers masculin. Or ce choix esthétique rappelle bien entendu les apports décisifs de Chanel à la mode féminine dans la première moitié du XXe siècle : des silhouettes longilignes habillées de vêtements dérivés du vestiaire traditionnellement masculin. [...]
[...] Une autre correspondance importante entre la publicité et le poème de Baudelaire réside dans l'évocation conjointe du contraste. En effet, la masculinité et la féminité qui permettent le surgissement d'une tension scénaristique dans la publicité évoquent les oxymores employés par Baudelaire dans son poème : les "âcres parfums" notamment, mais aussi "tes yeux (...) sont deux bijoux où se mêle l'or avec le fer". La mention de l'or et du fer - deux métaux dont l'un est précieux et l'autre sert à fabriquer des armes - rappelle le contraste entre l'apparente simplicité de Keira Knightley (et celle du parfum lui-même) et l'effet altier qu'elle produit parce qu'elle reste inaccessible. [...]
[...] Keïta Knightley en effet constitue dans la publicité l'avatar d'une féminité placée sous le signe de l'indépendance et de la conquête. La moto qu'elle enfourche n'est pas sans rappeler l'icône des amazones, de même que la notion de vitesse lorsqu'elle traverse Paris à vive allure. Ce déplacement opère un contraste fort entre le motif de la femme qui se prépare au sortir du lit, motif traditionnel des publicités de parfum, et l'image d'une femme qui non seulement se conduit elle-même à ses rendez-vous, mais le fait au moyen d'un véhicule généralement connoté du côté de la masculinité. [...]
[...] Ces emblèmes très forts de Paris permettent de mobiliser un imaginaire de luxe et de raffinement de manière aussi efficace que les acteurs eux-mêmes. En effet, si les éléments du décor apparaissent subrepticement et pourraient à première vue être considérés comme des supports secondaires, ils sont au contraire présents en toile de fond pour renforcer encore le message d'élégance véhiculée par le parfum. En cela, la publicité suggère que le parfum est un produit qui permet à la fois de forger une identité, mais également de définir une atmosphère. [...]
[...] Analyse d'un texte littéraire : Le serpent qui danse, Charles Baudelaire L'univers ainsi mis en place par Chanel dans ses supports publicitaires rappelle pour une large part les évocations poétiques de la féminité. Le parfum en effet s'appuie régulièrement sur le registre onirique afin de communiquer efficacement l'identité d'un nouveau produit. De ce point de vue, il se rapproche des textes publiés en célébration de la femme, dont certains exemples frappants nous ont été donnés par Baudelaire. Dans Le serpent qui danse, le poète esquisse une image de la femme portée par les sens, et notamment celui de l'odorat. [...]
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