Worldcom, faillite, histoire, Etats-Unis, gestion des risques, 2002, service téléphonique, longue distance
Worldcom c'est d'abord l'histoire d'une réussite capitaliste à l'américaine. Son fondateur a fait, en quelques années, d'une entreprise spécialisée dans la revente de capacités et de services téléphoniques longue distance, le deuxième opérateur de téléphonie américain.
Sa croissance exponentielle marquée par des fusions-acquisitions retentissantes est exemplaire.
Cependant, durant l'année 2002, l'entreprise est obligée d'avouer une des plus grandes fraudes comptables jamais réalisées : plus de 11 milliards de $ selon une technique toute simple : certaines dépenses étaient activées en investissements, des pénalités de retard étaient comptabilisées en revenus récurrents. De plus l'entreprise faisait un usage "ingénieux" des provisions afin de présenter des résultats conformes à l'attendu.
Si la découverte de la fraude est une surprise pour l'ensemble des marchés boursiers, différents facteurs auraient pu les alerter.
Tout d'abord la santé financière de l'entreprise était très fragile. Incapable de se financer en interne, elle était obligée de s'endetter soit auprès des banques, soit au travers d'émissions d'actions pour continuer sa politique de fusion-acquisition. Son endettement net était en forte hausse ce qui risquait de lui faire subir le retournement de l'effet de levier et donc de diminuer sa rentabilité financière. Le cours de l'action de l'entreprise avait perdu beaucoup de sa valeur depuis plusieurs trimestres ce qui rendait difficile l'émission d'actions. Pour garder la confiance des actionnaires, le management portait une attention particulière au cours de l'action au détriment des indicateurs plus opérationnels. Deuxièmement le marché des télécommunications était en récession du fait de son essoufflement et de la baisse continuelle des prix, la rentabilité des activités se dégradait. Ces différents éléments fragilisaient la santé financière et opérationnelle de l'entreprise. Pour garder la confiance des actionnaires, Worldcom a donc fait le choix de manipuler les chiffres.
S'ajoutait des facteurs liés au fonctionnement interne de l'entreprise. En effet l'organisation manquait de contre-pouvoirs pour équilibrer les rapports de force avec la direction générale. Les actionnaires étaient totalement absents du discours stratégique et ne s'intéressaient qu'à la remontée trimestrielle des chiffres. Quant aux salariés ils étaient totalement dévoués au directeur général. De plus l'entreprise communiquait sur sa performance à travers un indicateur, l'EBITDA, qui représente le résultat courant de l'entreprise à travers la formule : produits courants - charges courantes. Or, cet indicateur a précipité la fraude comptable qui permettait de transférer des produits non courants en produits courants et inversement pour les charges (...)
[...] Selon nous, cette crise est caractéristique de la place inconfortable du contrôleur en entreprise. En effet, un contrôleur de gestion qui constate une fraude doit il risquer sa place par intégrité ? Une question évidente moralement mais difficile sur un plan professionnel. Faut il que les associations de contrôleurs de gestion réfléchissent à un code de déontologie pour la profession donnant au contrôleur un bouclier légal pour condamner des abus en interne ? Les commissaires aux comptes: De même les commissaires aux comptes, appartenant à la société Arthur Andersen, réalisaient outre l'audit légal toutes sortes de prestations de conseil à haute valeur ajoutée. [...]
[...] - Mettre en place une meilleure gestion des investissements. Worldcom peut utiliser des indicateurs normalisés comme la VAN, le TIR ou le pay back, définir le capital investi, la rentabilité attendue et préciser l'avantage concurrentiel procuré . - Modifier le système de contrôle basé sur le cours de l'action car ce n'est pas le reflet de la réalité. Le cours de l'action dépend principalement de l'offre et de la demande sur les marchés boursiers et non de la performance des entreprises. [...]
[...] Les problèmes de déontologie et d'éthique sont au cœur de la crise. Les dirigeants de cette compagnie ont appliqué sans vergogne la logique du PDV (pas de vagues) ; logique qui veut que les marchés financiers apprécient les prévisions strictement respectées et qu'il faut donc présenter des résultats qui respectent parfaitement les objectifs sous peine de sanction boursière (chute du cours de bourse). Ainsi, la pratique déontologiquement répréhensible de lissage des résultats s'est amplifiée au niveau du top management jusqu'à devenir une fraude caractérisée de près de 11 milliards de La compagnie a usé de procédés douteux pour chercher à gonfler le résultat (passage à l'actif, revenus imaginaires Cette dérive est due à l'absence d'éthique dans la culture d'entreprise et a contrario de la primauté donnée à la rentabilité à CT qui a sacralisé l'EBITDA, un indicateur très manipulable. [...]
[...] Au cours d'un audit des comptes des plus classiques, réalisé à la suite de la démission du PDG, elle ne tarde pas à découvrir que durant les cinq derniers trimestres le directeur financier, Scott Sullivan, s'est adonné à des écritures comptables anormales. Une fois la découverte faite, elle en informe le Directeur de l'audit, Max Bobbitt, et la nouvelle se répand dans l'entreprise. Bientôt, la rumeur s'étend et les marchés sont pris d'inquiétude. Le mardi 25 juin 2002, est publié un communiqué de la part de Worldcom annonçant la réévaluation de ses déclarations comptables pour l'année 2001 et le premier trimestre 2002. [...]
[...] Cependant, sur le fond, Worldcom est avant tout victime d'une croissance externe non maitrisée. L'opérateur en effet, profité de l'euphorie du marché des télécoms et de la bulle financière pour acheter, de façon boulimique et au plus haut de leur prix, des entreprises, dont MCI, pour un total de plus de 30 milliards de $ (prix record pour l'époque). Cette série d'acquisitions onéreuses a fini par grever le bilan de Worldcom qui est devenue l'une des entreprises les plus endettée au monde (une dette de plus de 40 milliards de dollars). [...]
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