Engagement des individus, partage des connaissances, étude de cas, entreprises tunisiennes, typologies des connaissances, connaissances individuelles, connaissances organisationnelles, connaissance explicite, connaissance tacite, stratégie de codification, stratégie de personnalisation
Dans un environnement où la première certitude est l'incertitude, les règles du jeu de compétitivité évoluent d'une façon permanente et sont loin d'être réduites aux aspects purement matériaux (facteurs de production, transport, services après vente, etc.).On continue à parler des facteurs traditionnels de production (les machines, les matériaux et les hommes) mais on parle très peu des savoirs sans lesquels aucun de ces facteurs ne serait transformé en produit ou service (Nonaka, 1999). En effet, face à ce nouveau contexte, les entreprises qui veulent créer un avantage concurrentiel supplémentaire doivent désormais chercher les stratégies appropriées pour mieux gérer leurs propres capitaux intellectuels (Reix, 2001 ; Gupta, 2002).
C'est dans ce cadre que plusieurs chercheurs et praticiens appartenant à diverses disciplines (management des connaissances, apprentissage organisationnel, mémoire organisationnelle, etc.) se sont interrogés sur ce qui peut constituer la connaissance dans l'organisation, ce qui justifie la complexité de sa nature et la diversité de ses dimensions. Les différentes contributions ne prétendent pas être exhaustives en proposant des définitions exactes et des modèles universels, mais visent plutôt à enrichir la littérature consacrée à cette notion et les phénomènes y afférents.
Néanmoins, l'avantage concurrentiel que pourrait procurer ce nouveau facteur de production à l'organisation ne dépend pas uniquement de la simple possession des connaissances et leur stockage mais plutôt de la mobilisation de ces connaissances et leur partage entre tous les acteurs au sein de l'organisation. En effet, le développement des systèmes d'archivage, des bases de données centralisées n'a pas empêché les organisations de perdre des connaissances, dont certaines sont indispensables à leur fonctionnement (Lovsund & Spiegelberg, 2002 ; Cameron, 2002).
Le déploiement rapide des nouvelles technologies est perçu par la plupart de ceux qui s'intéressent à ce phénomène du partage des savoirs comme une véritable opportunité sans précédent qui peut ouvrir des perspectives plus que fructueuses grâce à la capacité de ces nouveaux outils en termes de stockage, de codification et de partage des savoirs.
Ainsi, et dans une vision parfois trop optimiste de déploiement de la technologie, beaucoup de dirigeants sont devenus obsédés par l'idée selon laquelle ces moyens, de plus en plus sophistiqués, vont mettre fin aux problèmes du partage des savoirs en enlevant les barrières face au partage des idées et par l'instauration d'un espace d'échange automatisé, libre mais fortement formalisé (Hendriks, 1999 ; Ellis, 2001).
Cependant, sous cette logique formelle caractérisée par la dominance des aspects purement techniques, la connaissance a été réduite à la simple information qui peut être codifiée et facilement transmissible par le biais des outils technologiques. Une telle attitude, actuellement omniprésente, appauvrit la richesse du processus de partage de connaissances en occultant par là même d'autres dimensions centrales, à savoir les dimensions individuelles, sociales et culturelles.
En effet, une réflexion plus profonde sur la question du partage du savoir montre bien que ce dernier ne peut être cantonné à un simple processus routinier d'échange, il s'agit plutôt d'un phénomène social complexe et dynamique (Ipe, 2003). Dés lors, si nous acceptons cette idée selon laquelle le partage des connaissances est un processus qui met plusieurs individus en interaction, nous pouvons dire que le succès de cette pratique dans les organisations dépend dans une large mesure de la volonté des acteurs à échanger librement et spontanément des savoirs et des idées avec leurs collègues.
D'ailleurs, les recherches précédemment citées et relatives au phénomène d'échange des savoirs dans les organisations (Szulanski, 1999; Disterer, 2001; Ellis, 2001 ; O'Dell & Mc Dermott, 2001; Bock & Kim, 2002 ; Ipe, 2003 ; Machialova & Husted, 2004) ont mis en exergue plusieurs barrières qui peuvent inhiber cette pratique (politiques, psychologiques, structurelles, culturelles, etc.). Toutes ces recherches ont eu pour objectif de proposer les stratégies les plus adéquates qui peuvent aider les managers à faire face aux comportements hostiles de rétention des connaissances et instaurer un climat de travail favorable aux échanges sociaux.
Partant des visions et des points de vue parfois divergents, les chercheurs dans ce domaine d'investigation relativement récent ont tenté d'identifier et d'examiner les facteurs qui peuvent motiver les individus et renforcer leur engagement pour partager davantage des connaissances.
Dans le cadre de cette recherche, nous nous intéressons à la problématique du partage des connaissances et ce à travers le questionnement suivant :
Quels sont les facteurs qui influencent l'engagement des individus pour partager des connaissances dans l'organisation ? Quelle est l'étendue de l'impact de ces facteurs sur l'engagement à partager ? Comment ces facteurs agissent-ils sur l'engagement des employés pour partager des connaissances ?
Pour répondre à cette problématique de recherche, nous allons présenter dans un premier chapitre quelques réflexions sur la notion de connaissance. Dans ce chapitre introductif, nous allons proposer quelques définitions de la connaissance, tracer ses limites et ses liens avec d'autres notions voisines (donnée et information) et présenter enfin ses typologies ainsi que les stratégies adoptées par les entreprises pour mieux la gérer.
Dans un second chapitre, nous allons passer en revue les différentes perspectives théoriques qui se sont intéressées à la question de la connaissance. Sur ce point, nous faisons la distinction entre deux perspectives importantes ; la première perçoit la connaissance comme un objet qui peut exister indépendamment de la personne qui l'a créée, quant à la seconde elle voit plutôt la connaissance comme une entité socialement construite.
Le troisième chapitre sera consacré aux déterminants du partage des connaissances dans les organisations. Nous entamons ce chapitre par quelques réflexions sur le phénomène d'échange des savoirs pour passer par la suite à l'étude de sa relation avec les structures organisationnelles ainsi que l'impact des technologies de l'information et de la communication sur ce processus.
Les facteurs agissant sur l'engagement des individus pour échanger des savoirs fait l'objet du quatrième chapitre où nous allons identifier et analyser ces différents facteurs qui peuvent influencer la volonté des employés pour partager librement des connaissances.
Cependant, pour mieux appréhender la dynamique d'échange des connaissances dans les organisations, nous allons confronter nos analyses théoriques développées au cours de la première partie aux données empiriques issues de deux études de cas qui feront l'objet de notre deuxième partie où nous allons examiner quelques pratiques de partage des savoirs dans deux entreprises tunisiennes à savoir Tunisie Leasing et la Banque Nationale Agricole.
[...] La confiance est une dimension fondamentale qui facilite l'apprentissage et l'échange des idées entre les employés. Ainsi, en l'absence de la confiance, les individus peuvent développer des comportements individualistes voire égoïstes qui les encouragent à retenir leurs propres savoirs en refusant de s'engager dans un échange libre avec leurs collègues (Ford et Chan, 2003). Dans ce même ordre d'idées, Zand, (1972) ajoute que les relations de méfiance qui créent un environnement d'incertitude peuvent se traduire ou bien par un refus et un rejet des informations et des idées venant des collègues ou par une mauvaise interprétation de ces informations et ces idées. [...]
[...] 2-5 Un système de récompense inadéquat : Afin de mieux appréhender l'impact des récompenses sur le partage des connaissances dans la Banque Nationale Agricole, nous les avons scindées en deux catégories: les incitations financières et la reconnaissance. 2-5-1 Les incitations financières : Comme pour le cas de Tunisie Leasing, la Banque Nationale Agricole n'a pas encore développé tout un système pour récompenser la contribution des employés dans le processus d'échange des informations et des savoirs. En effet, l'évaluation de la contribution de chaque employé dans ce processus fait l'objet d'une simple appréciation des chefs hiérarchiques. [...]
[...] Il s'avère que la réussite des pratiques d'échanges des connaissances au sein de toute entreprise passe d'abord par une identification des barrières qui peuvent inhiber la communication interpersonnelle. 2-4 Des relations de confiance réciproques : Comme nous l'avons discuté précédemment, la nature et les caractéristiques de la structure de la communication dans l'entreprise influence profondément les relations interpersonnelles y compris les relations de confiance. Ainsi, cette dimension critique peut être une solution efficace pour surmonter les barrières individuelles et les comportements individualistes de rétention des savoirs (Ellis, 2001). [...]
[...] Mintzberg, (1989, 62) affirme que parallèlement aux mécanismes formels de communication un réseau riche de communication informelle vient s'ajouter aux circuits réguliers et parfois les contournent Cette forme d'organisation informelle qui n'a pas été conçue préalablement par la hiérarchie résulte de la formation des groupes, d'affinités et de liens qui se constituent infailliblement quand les hommes se fréquentent journellement (Tannenbaum 1). Trois éléments fondamentaux caractérisent cette forme d'organisation informelle (Tannenbaum, 1962) : Le développement spontané de relations fondées sur la sympathie et la solidarité. Le développement de normes et de comportements admissibles, en matière de productivité ou d'assistance mutuelle. Le renforcement de ces normes par un responsable et par les membres du groupe eux-mêmes. Deux raisons peuvent expliquer l'importance de la communication informelle. La première est directement liée au travail. [...]
[...] La première perspective conçoit la connaissance comme un objet qui pourrait exister indépendamment de la personne qui l'a créée. La seconde perspective, au contraire, postule que le savoir est une entité socialement construite à travers un processus d'interaction dans un contexte historique et socioculturel précis (Chanal ; Croasdell & al, 2002). Nous devons signaler que cette distinction est importante pour notre recherche. En effet, la perspective selon laquelle la connaissance est conçue affecte dans une large mesure le processus de partage des savoirs entre les individus (Boer & al, 2002). [...]
Référence bibliographique
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