Négociation asymétrique, Renault, Nissan, Nissan Motors, Nissans Diesel, Daimler-Chrysler, différences culturelles, cartésianisme français, managers français, malentendus, Carlos Ghosn, marketing interne
Il s'agit là d'une négociation entre deux poids lourds de l'automobile qui, l'un comme l'autre, avaient tout intérêt à opérer au moins à un rapprochement. L'un de ses points forts est qu'elle s'est déroulée dans le plus grand secret de son début à son terme, et que ceux qui ont suivi cette affaire de loin ont pu croire que l'accord de mars 1998 fut immédiat et peu négocié. En réalité, les dirigeants des deux groupes avaient commencé leurs rencontres en juin 1997 sans mot dire.
Si ces négociations ont su se garder secrètes, c'est qu'elles relevaient d'un intérêt hautement stratégique pour les deux firmes, et que leur divulgation à l'opinion publique aurait changé considérablement la donne. En effet, si les prises de participation relèvent souvent de stratégies opaques, l'intérêt que porte Renault à Nissan n'a rien de mystérieux : il s'agit de s'ouvrir au marché asiatique en faisant construire les modèles Renault par les unités de production implantées sur place.
Toutefois le contexte mouvant de ces tractations ont amené à réorganiser la stratégie de négociation de Renault à de nombreuses reprises, et à réévaluer les objectifs.
Ainsi cette négociation est intéressante à bien des égards puisqu'elle possède de nombreuses spécificités qui nous font prendre conscience s'il en était besoin, de l'importance prépondérante du contexte de la négociation sur la négociation elle-même.
La définition des acteurs et de leurs spécificités historiques pèse donc lourd dans la balance. Plongé dans un contexte économique bouleversé dont nous verrons à quel point il fut déterminant au déclenchement des négociations, Renault a dû aussi tenir compte de larges différences culturelles qui, une fois désamorcées, ont finalement été la clé de l'aboutissement des pourparlers.
[...] Sans entrer dans les détails, le pouvoir des sociétés de commerce (les fameuses Sôgô Shôsha) sur les importations est, pour des raisons historiques, total et structure l'économie japonaise : elles sont très diversifiées et donc : - très sélectives dans leurs importations - très prudentes dans la promotion des produits étrangers - ne peuvent constituer de bons agents importateurs pour les entreprises occidentales. Le secteur automobile figure parfaitement ce déséquilibre De surcroît, le secteur automobile est celui qui figure le plus cette asymétrie dans les relations commerciales nippo-européennes. En effet, la fixation anticipée de quotas au sein d'un accord d'autolimitation informel cristallise cette asymétrie. Or l'année 2000 était prévue comme la première année d'ouverture complète du marché européen aux constructeurs japonais. Inutile de dire que les constructeurs français, et Renault en premier, redoutaient ce cap. [...]
[...] C'est alors que Renault commence à s'intéresser à Nissan. Les deux dirigeants se rencontrent le 22 juillet au siège de Tokyo. Mais la complémentarité évidente entre les deux entreprises saute vite aux yeux des dirigeants : complémentarité de gamme, de sites de production, d'innovation, Ainsi les dirigeants de Renault révisent leurs objectifs jusqu'à une prise de participation à hauteur de Cette barre est déterminante puisqu'en dessous, Renault ne fait apparaître dans ses comptes que les dividendes versés. Une prise de participation supérieure est un pari risqué puisqu'il serait beaucoup plus mal perçu par les actionnaires. [...]
[...] Rhône-Poulenc s'est installé par étapes, sur plus de vingt ans explique Alain Coine, directeur jusqu'en 1997 de Rhône Poulenc Japon. Nous avons démarré des accords de trading en 1970, puis des joint-ventures Mais les événements financiers de 1997 jettent un voile de doute sur l'hégémonie (certains diront l'arrogance) de la puissance japonaise. La crise de 1997 inverse l'asymétrie et déclenche les velléités commerciales Crise financière asiatique et ses effets sur la zone asiatique et sur Nissan en particulier Un choc financier pour les entreprises nipponnes Brièvement dit, la crise financière asiatique a eu pour effet premier une dépréciation forte de la quasi-totalité des monnaies des pays dont le Japon était créancier. [...]
[...] En réalité, les dirigeants des deux groupes avaient commencé leurs rencontres en juin 1997 sans mot dire. Si ces négociations ont su se garder secrètes, c'est qu'elles relevaient d'un intérêt hautement stratégique pour les deux firmes, et que leur divulgation à l'opinion publique aurait changé considérablement la donne. En effet, si les prises de participation relèvent souvent de stratégies opaques, l'intérêt que porte Renault à Nissan n'a rien de mystérieux : il s'agit de s'ouvrir au marché asiatique en faisant construire les modèles Renault par les unités de production implantées sur place. [...]
[...] Ford Les enjeux en terme de présence sur les marchés asiatiques sont moindres pour la firme américaine puisqu'elle possède déjà 33% de Mazda. Mais elle jouit elle aussi d'une image bien plus forte que le groupe français. Les états respectifs des deux principales entreprises Ils jouent eux aussi un rôle qui ne doit pas être sous-estimé : on connaît la mainmise culturelle de l'Etat nippon sur ses entreprises. En dernier ressort c'est lui qui tranchera : si une prise de contrôle menace l'indépendance de l'archipel, il s'y opposera. Toutefois, le contexte économique (voir partie suivante) nuance beaucoup cette mainmise traditionnelle. [...]
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